Les fistules : une tragédie silencieuse pour des milliers de femmes
En RD du Congo, les femmes accouchent souvent à la maison et sans assistance médicale professionnelle. Les accouchements peuvent durer de nombreuses heures, voire même plusieurs jours. Cependant, plus l’accouchement est long, plus le risque de complications au cours desquelles le bébé et/ou la maman ne survivent pas est élevé. Un tel accouchement n’est pas seulement traumatisant, il conduit aussi souvent à des lésions telles que les fistules obstétricales. Une fistule se produit lorsque la tête du bébé exerce une pression de longue durée sur les parois du canal pelvi-génital. Les tissus sont alors privés de sang pendant un long moment et sont endommagés, ce qui crée une ouverture entre le vagin et la vessie ou entre le vagin et le rectum (ou les deux). Il en résulte une incontinence permanente.
Exclusion sociale
Plus de 2 millions de femmes et de filles en Asie et en Afrique subsaharienne vivent avec une fistule non traitée. Chaque année, environ 50 000 à 100 000 nouveaux cas s’ajoutent (OMS, 2018). Ces chiffres ne reflètent qu’une partie de la réalité. En effet, beaucoup de femmes n’osent pas exprimer leurs symptômes. Beaucoup subissent une fuite urinaire constante, ce qui peut causer des odeurs désagréables. Les femmes qui vivent avec une fistule ont souvent honte et n’osent pas demander de l’aide. Le problème de la fistule dépasse le cadre médical. Cette condition peut conduire à l’exclusion sociale et à la dépression. Ce handicap à vie s’ajoute souvent au traumatisme intense que les femmes ont déjà vécu : la perte d’un enfant à la suite d’un accouchement éprouvant.
La pauvreté, principale cause indirecte
En Belgique, les fistules obstétricales sont rares. « En trente ans de travail, je n’ai rencontré le problème que deux fois et il a été immédiatement traité chirurgicalement », explique Sabine Van de Vyver, sage-femme en chef à l’hôpital AZ Sint-Vincentius de Deinze et bénévole de l’initiative Hôpital pour Hôpital.
Les fistules sont un signe qu’un système de soins de santé ne fonctionne pas correctement. En effet, une femme qui est correctement suivie lors de son accouchement ne développera pas de fistule. La fistule touche les femmes les plus vulnérables de la société : les futures mères qui ne peuvent pas se rendre à l’hôpital ou au centre de santé (à temps), les femmes déjà affaiblies par la malnutrition, ou les jeunes filles dont le corps n’a pas encore atteint sa pleine maturité. Bien que les césariennes puissent prévenir la fistule dans certains cas, une approche globale est nécessaire pour éliminer le problème. Il n’est pas suffisant de promouvoir les césariennes s’il n’y a pas de personnel qualifié pour les réaliser ou s’il n’y a pas de transport d’urgence pour amener la patiente à l’hôpital.
La présence de personnel médical bien formé est nécessaire
« La prévention est cruciale », déclare la Dr Véronique Ballegeer, gynécologue à l’hôpital de Bruges et bénévole de Hôpital pour Hôpital. À Popokabaka, en RD du Congo, elle a constaté que la vessie est rarement vidée lors de l’accouchement, avec toutes les conséquences que cela entraîne. « Une fistule peut être évitée, mais cela nécessite un personnel médical bien formé. »
« Pour traiter une fistule, une intervention chirurgicale est nécessaire et cela ne peut pas être fait dans un centre de santé. Les femmes doivent se rendre à l’hôpital, ce qui coûte beaucoup d’argent. En conséquence, beaucoup de femmes n’y ont pas recours. » En améliorant l’accès aux soins de santé, financièrement (fonds de solidarité) et logistiquement (moto-ambulances), Memisa contribue à réduire l’incidence des fistules.
Nous profitons du 8 mars, journée internationale des droits de la femme, pour attirer l’attention sur le problème des fistules. Memisa et ses partenaires commenceront bientôt une formation en Ituri (RD du Congo) sur la fistule obstétrique afin qu’à l’avenir des interventions chirurgicales puissent être effectuées pour résoudre ce problème. Memisa veut ainsi rendre leur dignité aux patientes souffrant de fistules.
Ituri : « La violence sexuelle peut aussi conduire à des fistules »« En Ituri, dans l’est du Congo, la fistule est un problème de santé majeur », déclare Sœur Jean Cécicle Nyamungu Atimnedi, médecin et coordinatrice médicale de notre partenaire le BDOM. « Au cours des deux dernières années, nous avons pu soigner 400 femmes dans cette région, mais nous estimons qu’environ 6600 femmes vivent encore avec une fistule. L’insécurité dans la région signifie que les femmes enceintes ne peuvent pas se rendre dans les centres de santé, elles accouchent à domicile sans assistance, ce qui augmente le risque d’une fistule grave. Les femmes qui sont violées pendant cette guerre peuvent aussi avoir une fistule par la suite et avoir des fuites urinaires constantes. En mars, mois consacré aux femmes, prenons un moment pour nous souvenir de toutes les femmes qui ont perdu leur dignité à cause d’une fistule, quelle qu’en soit l’origine. » |
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